• Des nouvelles de la Ministre: "L'autonomie a provoqué un déclic"

    Une interview de Valérie Pécresse parue dans Les Echos: "L'autonomie change tous les repères"


    Deux ans après le vote de la loi LRU, quel bilan tirez-vous de son application ? 

    Le constat est clairement positif. La prise d'autonomie des universités se déroule plus vite que prévu : 60 % des 85 universités seront passées aux responsabilités et compétences élargies en deux ans, soit un rythme bien plus rapide que la montée en charge initialement prévue (20 % par an). Cette dynamique montre la forte aspiration des universités à profiter de cet espace de liberté nouveau.

    C'est-à-dire ? 

    L'autonomie a provoqué un déclic. Elle a incité les universités à se rapprocher des autres acteurs de l'enseignement et de la recherche, qu'il s'agisse de leurs homologues, des grandes écoles ou des organismes de recherche. Le problème de l'université française, c'est qu'elle a été morcelée en disciplines. Or, pour proposer un enseignement attractif et espérer une visibilité internationale, il est essentiel de savoir développer des expertises et des stratégies communes, de regrouper les publications.

    Ces possibilités sont-elles déjà intégrées ? 

      Les exemples sont nombreux. A la rentrée prochaine, les premières classes préparatoires aux grandes écoles seront ouvertes au sein des universités. Autre initiative, Paris-Orsay, qui a signé en mai dernier un accord de double diplôme avec l'Ecole polytechnique. De même, les différents acteurs de l'enseignement supérieur tendent à se rassembler au sein des pôles de recherche et d'enseignement supérieur (Pres), qui sont actuellement douze en place. Ainsi, le Pres de Lyon regroupe les trois universités de la ville, les deux écoles normales supérieures, l'Ecole centrale, l'EM Lyon, et l'IEP. En mettant en place des signatures communes, des collèges doctoraux, et des doubles diplômes, ces pôles pourront davantage rivaliser au niveau mondial.

    La réforme a pourtant été rudement attaquée, avec de nombreux mouvements au sein des campus. Y a-t-il encore des ajustements à faire ? 

     Il faut bien comprendre que l'autonomie change tous les repères. Nous passons d'un système où la réalisation de projets demandait des trésors d'énergie, à un système où ceux qui ont des idées peuvent les concrétiser rapidement. Il est normal que cela suscite des craintes.

    Prenons la gouvernance. Certains présidents étaient élus au 28tour par un collège de 140 membres. Quelle est alors la légitimité de l'intéressé ? Aujourd'hui, l'application de la loi est de nature à rassurer. Il faut la laisser vivre.

    Certains s'inquiètent aussi de l'arrivée de financement et d'acteurs du secteur privé. 

    C'est un débat du passé. Il est urgent de rapprocher l'université avec l'univers socio-économique. C'est ce que nous réalisons en mettant l'accent sur l'insertion professionnelle des étudiants, que la loi a inscrite dans les missions des universités ou encore via la mise en place des fondations privées. Ces rapprochements ne signifient en aucun cas une privatisation. Depuis 2007, l'Etat a augmenté son budget des universités de 1 milliard par an. Lorsqu'on sait que les fondations ont récolté quelque 65 millions du privé, il n'est pas raisonnable de parler de désengagement de l'Etat.

    Le classement de Shanghai, comparant les performances des universités au niveau mondial, devrait être rendu public prochainement. Vous attendez-vous à ce que la loi LRU améliore dès cette année les performances des universités françaises ? 

      A terme oui. Ce classement a beaucoup de défauts, mais on ne peut pas l'ignorer. Il n'est pas adapté pour valoriser les forces de l'enseignement français. Lorsque vous avez 85 universités, 225 grandes écoles, et 21 organismes de recherche, vous n'êtes pas lisibles pour un classement de ce type. J'ai proposé, durant la présidence française européenne, de mettre en place une alternative européenne. Une dizaine de pays européens ont accepté de participer. Il ne s'agit pas d'un classement, mais d'une cartographie. Les universités seront ainsi évaluées par formation (droit, économie gestion, sciences) et non par établissement. Un premier établissement a été choisi avant l'été pour établir une cartographie en économie et en sciences de l'ingénieur pour 2012.

     

    via: http://www.lesechos.fr/info/france/02095789270--l-autonomie-change-tous-les-reperes-.htm


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