• Formation universitaire des maîtres : communiqué de l’Association « Reconstruire l’Ecole » (14 septembre 2009)

    L’Association « Reconstruire l’Ecole » prend acte des décrets sur le nouveau dispositif de formation des maîtres tels qu’ils ont été publiés au JO du 28 juillet 2009.

    Elle constate que le mouvement du printemps dernier, inédit par son ampleur et sa durée, a permis d’importantes avancées sur ce dossier :

    - L’agrégation est maintenue en dehors du cadre de la « mastérisation ».
    - Les certifiés stagiaires ne seront plus employés à temps plein.
    - Toute référence à d’éventuels « masters d’enseignement » a disparu.
    - Les étudiants bénéficient de 3 ans pour obtenir l’ensemble master+ concours

    Nous considérons que ce dispositif doit être amélioré en ce qui concerne l’année de stage et que la charge d’enseignement y est encore trop lourde. Nous proposons : 1/3 d’enseignement en responsabilité, 1/3 de pratique accompagnée et 1/3 de formation complémentaire. Ces deux derniers tiers sont d’autant plus indispensables que beaucoup de lauréats, en particulier les candidats libres, n’auront effectué aucun stage avant leur réussite au concours.

    Les trois critiques que nous adressions aux « masters d’enseignement » et qui ont été reprises par le mouvement universitaire de l’an dernier restent évidemment inchangées :

    - Il y aurait une masse énorme de « reçus-collés », constituant une « armée de réserve » d’enseignants précaires qui finirait par mettre en cause l’existence même des concours. Cette idée d’une « professionnalisation en amont » est particulièrement absurde : dans aucun autre cursus, ni en France ni à l’étranger, on ne professionnalise 10 fois plus d’étudiants qu’il n’y a de débouchés possibles dans un secteur.
    - Ces masters d’enseignement ouvriraient la porte à une dénaturation du caractère disciplinaire des concours.
    - Dans de nombreuses disciplines, en particulier en lettres et sciences humaines, ces masters « professionnels » videraient les actuels masters-recherche. La plupart des universités deviendraient alors des sortes de « community colleges », s’arrêtant à la licence et devraient même renoncer, faute de masters, à préparer l’agrégation.

    C’est pourquoi nous défendons les sept revendications suivantes :

    1. Il faut garantir le caractère disciplinaire des futurs concours du secondaire. Nous appelons l’ensemble des Associations de spécialistes et Sociétés savantes à peser de tout leur poids en ce sens.

    2. Il faut continuer de refuser les « masters d’enseignement ». La politique de « non-remontée des maquettes » doit donc être maintenue, y compris contre les instances universitaires concernées (présidence, conseils centraux, « comités de pilotage » ad hoc). Il revient aux différentes UFR d’exclure toute collaboration à des masters de ce type, rendant ainsi impossible leur mise en place.

    3. Il faudra réaménager les actuels masters-recherche dont le volume horaire (3 séminaires de 2 heures dans la plupart des cas) est du reste très insuffisant. Outre ces séminaires, qui doivent être maintenus, il faut donc assurer un enseignement complémentaire des fondamentaux de la discipline, qui sont loin d’être aujourd’hui maîtrisés par l’ensemble des licenciés. Il faudra enfin hisser ces nouveaux masters au niveau de la « spécialité », ce qui n’est généralement pas le cas en ce moment, de façon à y aménager clairement des parcours distincts en fonction des choix professionnels des étudiants (doctorat, CAPES, agrégation, éventuellement d’autres orientations). Dans l’immédiat, il convient de mettre en place un jeu d’options (davantage de recherche ou davantage de fondamentaux de la discipline) pour garantir au mieux le libre choix par les étudiants de leur avenir professionnel. Les problèmes budgétaires liés à ce renforcement des masters peuvent être résolus d’une part grâce au transfert aux UFR de l’intégralité des sommes aujourd’hui alloués aux IUFM pour la préparation des concours, d’autre part grâce à la forte augmentation du nombre d’étudiants inscrits en master et enfin par la mutualisation d’une partie des enseignements destinés aux étudiants de master, aux candidats au CAPES et aux candidats à l’agrégation.

    4. La préparation des concours doit se faire en dehors des masters, sur le modèle du dispositif maintenu pour l’agrégation. Dans le cas où ces enseignements seraient partiellement communs, leur évaluation aurait lieu sur des critères différents, comme c’est d’ailleurs déjà le cas dans de nombreuses universités ou à l’ENSLSH de Lyon. Les étudiants qui voudraient présenter le CAPES en M2 recevraient donc un enseignement en partie spécifique, ne donnant pas lieu à une évaluation universitaire (en particulier pour les candidats qui effectueraient des stages dans les établissements scolaires) sur le modèle de ce qui se fait, par exemple, dans le master « Philosophie et sociologie » de l’université de Paris I. C’est pourquoi nous nous félicitons de ce que les décrets du 28 juillet garantissent le bénéfice du concours pendant un an. Au cours de cette année supplémentaire, les lauréats des concours pourront finir (ou éventuellement entreprendre) les études correspondant à la deuxième année de master. Il est d’ailleurs probable que la majorité des étudiants choisiront d’inverser les priorités et préfèreront obtenir d’abord un master complet avant de se lancer dans la préparation des concours.

    5. Pour compenser les frais que suppose le prolongement des études et s’il n’est pas possible de rétablir des pré-recrutements sur le modèle des anciens IPES, il faut augmenter le nombre et le montant des bourses et/ou des allocations (sur critères à la fois académiques et sociaux) dans des proportions très supérieures à ce qui est aujourd’hui prévu.

    6. L’année de stage, dont il n’est pas question dans les décrets du 28 juillet, doit être aménagée selon le modèle précédemment décrit des « trois tiers ».

    7. Les séminaires inclus dans les nouveaux masters disciplinaires doivent être conçus comme une initiation à la recherche. La recherche proprement dite doit se mener en troisième cycle. Il faut donc que les doctorants puissent suivre, en plus de leur travail de thèse, de véritables « cours de doctorat », donnant lieu à l’attribution de crédits ECTS sur le modèle des cours de PhD aux Etats-Unis, qui est aujourd’hui généralisé dans le monde entier. C’est le seul moyen de donner la consistance nécessaire au troisième cycle, désormais amputé du DEA, puisque ce niveau D, où se mesure l’excellence universitaire selon tous les critères internationaux, est aujourd’hui devenu une pure fiction, en particulier dans le domaine des Lettres et sciences humaines.

    A Paris, le 14 septembre 2009

    Source : http://www.sauvonsluniversite.com/spip.php?article2937


    Tags Tags : , , ,