L’Etat veut noircir le tableau

Aforce de vouloir en faire trop, on risque la boulette. Et c’est ce qui est arrivé au ministère de l’Enseignement supérieur. Trop content de montrer que les universités les plus contestataires faisaient fuir les étudiants, il a récemment fait savoir que les demandes d’inscription pour Paris-8, l’ancienne Vincennes en pointe dans la mobilisation, avaient chuté cette année de 50 %, celles pour Paris-IV - Sorbonne de 25 %… Mais l’information était apparemment un peu hâtive.

Cette année pour la première fois, les lycéens d’Ile-de-France ont formulé des vœux dans le cadre d’un nouveau dispositif appelé «admission post-bac». Ils l’ont fait en pleine crise, du 20 janvier au 20 mars. Dégoûtés par les grèves à répétition, ils n’auraient donc été que 1 470 à mettre Paris-8 en premier vœu, contre 3 060 l’an dernier. «C’est totalement faux : le chiffre est de 3 380, nous avons même une petite augmentation, affirme Pascal Binczak, le président de l’université, et encore nous n’avons pas les chiffres de notre filière la plus sélective, information et communication». La différence viendrait du fait que le ministère compare des chiffres qui ne sont pas comparables.

Au même titre que les examens menacés des étudiants, le gouvernement a tenté de faire de l’image écornée des universités un thème de sa campagne contre les contestataires. Mais devant les remous suscités par ces chiffres, il a paru battre en retraite. Prudent, le rectorat de Paris, qui a publié le 31 mars quelques tendances à partir de ces inscriptions, se refuse désormais à les commenter. Il explique qu’il ne s’agit que de vœux provisoires, les élèves ayant jusqu’au 6 juin pour modifier leurs souhaits, et qu’il est donc prématuré de tirer des conclusions fines. Selon les chiffres officiels, les lycéens des filières générales sont encore plus de 42 % à vouloir s’inscrire en priorité en licence à la fac. Envers et contre tout.