• Réformes Darcos et Pécresse : le recul mot à mot

    Enseignement . Retour sur les circonvolutions linguistiques ministérielles.

    Comment trouver les mots pour ne pas le dire… Deux ministres - Xavier Darcos à l’Education nationale et Valérie Pécresse à l’Enseignement supérieur - viennent de se livrer à l’exercice : contraints de suspendre leur réforme, ils ont tenté de faire croire qu’ils ne reculaient pas, tout en reculant. La palme de la tergiversation revient à Valérie Pécresse. Elle s’est battue jusqu’au bout à coup de circonvolutions, avant d’avouer, vendredi, que son décret sur le statut des enseignants-chercheurs serait tout bonnement «réécrit».

    «Conservatismes». Les temps sont durs pour les ministres zélés. Chacun dans leur style - pressé et parfois brutal pour Xavier Darcos, pressé mais plus policé pour Valérie Pécresse -, tous deux ont voulu mettre en œuvre au plus vite les réformes voulues par Nicolas Sarkozy. Certaines sont passées, non sans mal. Mais d’autres ont buté face aux protestations. Et ce n’est pas facile d’avouer que l’on doit céder lorsque l’on est sûr d’avoir raison face aux «conservatismes» (Xavier Darcos) ou convaincue de «moderniser» une université abandonnée depuis vingt ans (Valérie Pécresse).

    «Charte». La ministre de l’Enseignement supérieur a mis un certain temps à mesurer l’ampleur de la contestation. Alors que la grève s’étend en janvier dans les universités, elle ne parle que de «donner des garanties» et de «rassurer» les enseignants-chercheurs. «Le retrait du texte [réformant leur statut] serait un recul considérable», assène-t-elle encore le 3 février.

    Au mieux, elle concède qu’il faudrait mettre au point une «charte de bonne application» avec les présidents d’université. Le but étant toujours de «rassurer» les enseignants-chercheurs qui s’inquiètent de leur toute puissance.

    Mais des dizaines de milliers d’universitaires défilent dans toute la France. La ministre parle alors de «réexaminer» ou de «retravailler» le texte. Le 9 février, elle nomme une médiatrice, Claire Bazy-Malaurie. «Il me revient d’essayer de construire un texte nouveau qui sera probablement quand même sur les bases du texte actuel, avec des aménagements», déclare la médiatrice le 11 février en lançant sa mission. Le texte est de facto enterré. Mais l’heure n’est pas encore à la transparence.

    «Caduc». Le 15 février, Valérie Pécresse atteint des sommets rhétoriques. Le Snesup-FSU, premier syndicat du supérieur, lui a demandé de déclarer son texte «caduc». Interrogée sur radio J, elle répond : «Il est remis sur le métier. Mais il n’est pas caduc car il n’existait pas.» Elle s’accroche encore à ses «principes fondateurs». Le 25 février, pressé d’en finir, François Fillon porte l’estocade linguistique. Il annonce l’arrêt des suppressions de postes à l’université en 2010 et 2011 et demande que le décret soit «entièrement réécrit». Pécresse rend alors les armes.

    Xavier Darcos a été plus expéditif. Le 15 décembre 2008, lorsqu’il annonce la suspension de sa réforme du lycée, il cherche à sauver la face : il affirme vouloir «laisser plus de temps pour sa mise en œuvre» et «retrouver un consensus».

    «A zéro». Mais il lui faut ramener le calme dans les lycées. Et ça ne suffit pas. Alors le lendemain, il n’a plus ces pudeurs : «Nous allons repartir à zéro, nous ne ferons pas cette réforme sans la jeunesse.» Mais pour lui, c’est plus facile. D’abord il assure que «c’est reculer pour mieux sauter». Entendez : il fallait sacrifier momentanément la réforme pour mieux la sauver. Ensuite, il explique que ce n’est pas elle qui coince mais le «malaise de la jeunesse». Enfin, il reste dans les petits papiers de Nicolas Sarkozy qui lui donne du «Xavier» à tour de bras. Ce qui vaut bien d’avaler quelques couleuvres.

    Source : http://www.liberation.fr/education/0109472562-reformes-darcos-et-pecresse-le-recul-mot-a-mot


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