• La réforme du collège unique, c’est maintenant ou jamais

    Depuis 20 ans, il n’a pas manqué un ministre de l’éducation pour dire que sa priorité était la réforme du collège unique, maillon faible du système éducatif. Et dans le même temps, il n’y a pas un sujet sur lequel on ait aussi peu progressé. Le colloque du samedi 28 novembre à la Sorbonne tentera de proposer des pistes d’action pour sortir de l’inertie.

    Lorsque Xavier Darcos s’est installé rue de Grenelle, il ne manquait pas de projets et la réforme du collège unique faisait partie des dossiers brûlants. L’auteur de « l’art d’apprendre à ignorer », tout heureux de se retrouver en position de régler les problèmes de l’Éducation Nationale, se mit rapidement au travail.

    Changement des programmes du primaire et du collège, correction de multiples dysfonctionnements, développement du soutien scolaire, semaine de 4 jours, mise en place de nouveaux modes d’évaluations, etc. De multiples changements qui donnèrent le tournis aux enseignants.

    Xavier Darcos aurait certainement poursuivi son travail s’il n’avait pas eu pour mission de faire accepter la suppression de dizaines de milliers de postes. Les lycéens jetés dans la rue au printemps 2008, par des enseignants lassés de leurs grèves inutiles, firent reculer l’inoxydable Ministre. Craignant de ne pouvoir les contenir, il fut contraint d’acheter les lycéens avec une promesse de réforme, réforme qui occupera inutilement son temps, n’aboutira pas et le conduira à laisser son maroquin à Luc Chatel, avec l’insatisfaction de n’avoir pu faire tout ce qu’il espérait.

    Un an et demi plus tard, on parle encore et toujours de la réforme du lycée, comme si un quelconque changement à ce niveau allait supprimer l’échec massif des bacheliers sur les bancs de la fac. Qui ne voit pas que le problème est en amont ? Quid du collège ? Ce collège dont on dit depuis 20 ans qu’il est le maillon faible du système éducatif ? En 2002, plusieurs enquêtes avaient mis en évidence le découragement des enseignants, dont une du syndicat FSU qui avait fait grand bruit, montrant qu’une majorité des enseignants ne voulaient plus entendre parler de collège unique.

    Bientôt 2010, et rien de nouveau sous le soleil. Le collège continue à accueillir des enfants en retard scolaire, incapables de suivre le programme unique du collège, programmés pour une sortie 4 à 5 ans plus tard sans la moindre qualification. Pire, ces jeunes quittent le collège avec moins de connaissances qu’à la fin du primaire, et surtout aigris d’avoir du supporter une situation d’échec quasi-permanent pendant toutes ces années. 150 000 jeunes par an, c’est le nombre de ces collégiens qui n’atteindront même pas le niveau du brevet.

    Au delà : 50 000 lycéens qui n’auront jamais leur bac. Puis 50 000 bacheliers qui échoueront dans leurs études supérieures.

    Cette situation, qui fait qu’un enfant en retard au début du collège ne pourra jamais le rattraper, n’est plus acceptable. Elle ne l’a jamais été mais il serait indécent de continuer à observer ce désastre sans y voir une priorité. Est-il donc si difficile de s’attaquer à cette question ?

    Le 28 novembre, un colloque intitulé « Vers un renouveau du collège unique ? » permettra de relancer un débat qui ne devra s’arrêter que lorsque les solutions auront été trouvées, et que leur mise en œuvre aura été programmée.

    Longtemps, des groupuscules ultra minoritaires - mais bien introduits - ont tenté d’imposer l’idée que l’échec du collège unique s’expliquait par l’archaïsme du système. Il suffisait de supprimer les contenus d’enseignement difficiles, les redoublements, les examens, puis de transformer les enseignants en admirateurs béats des performances des élèves, aussi maigres soient-elles, pour faire disparaître l’échec scolaire et inventer l’école du futur où tout le monde réussirait. Ils ont eu quelques influences et les programmes scolaires se sont progressivement appauvris. Mais ce n’est pas en demandant moins que l’on obtient plus, et l’écart entre les plus faibles et les meilleurs (que l’on ne peut empêcher d’être performants) n’a fait que se creuser.

    Si nous tournons la page avec cette mauvaise pente de la facilité qui, tout en abaissant le niveau des exigences, n’a fait qu’amplifier le problème, nous pourrons enfin nous ouvrir aux seules solutions réalistes : celles qui combineront une nouvelle exigence, conforme aux aptitudes réelles des élèves, avec une personnalisation des parcours de telle façon que tous n’apprennent pas la même chose dans le même temps. Pourquoi ne pas tenir compte des réelles difficultés des élèves et leur donner le temps et les outils qui leur permettraient de les surmonter ?

    Il s’agit de repenser l’organisation du collège et le colloque du 28 novembre ouvrira des pistes en ce sens. Pistes qui seront ensuite débattues et rappelées jusqu’à ce qu’un frisson secoue la rue de Grenelle. Il n’est pas interdit d’espérer.

    Source : http://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/la-reforme-du-college-unique-c-est-65460


    Tags Tags : , , , ,