• Un certain président de la République a, dans un passé récent, manifesté éprouver de l’embarras devant La Princesse de Clèves. Aujourd’hui que le gouvernement vient de rédiger une oeuvre législative sans précédent (l’ensemble des décrets sur la mastérisation parus le 29 juillet 2009 et la circulaire sur le même sujet du 5 juin 2009), il est tentant de se livrer à l’exercice inverse, et de la présenter à ladite Princesse. décrets portant modification des décrets de 1972 relatifs aux statuts des enseignants... Imaginez un peu le spectacle !

    Je ne sais pas si cela vous est souvent arrivé de demander à la Princesse de Clèves ce qu’elle pensait du texte des

    I. LA LOI, RIEN QUE LA LOI

    Commençons par un état des lieux.

    Suite aux décrets du 29 juillet 2009 concernant de fait la formation et le recrutement des enseignants (réforme de la "mastérisation"), quelle est la situation pour l’ensemble des étudiants concernés ? Nous distinguerons la situation à terme (qui entrera en vigueur à partir de septembre 2010) et la situation transitoire pour la présente année 2009-2010.

    1. SITUATION EN VIGUEUR A PARTIR DE SEPTEMBRE 2010

    A. CONCOURS PE ET CAPES

    Pour les étudiants préparant les concours de Professorat des écoles et du CAPES (étudiants PE et PLC), il y a DEUX EXIGENCES, l’une requise pour l’inscription au concours (1), et l’autre pour la nomination en qualité de fonctionnaire stagiaire (2).

    (1) A l’inscription, ils devront être au moins détenteurs d’un M1 et, s’ils n’ont que le M1, obligatoirement inscrits en M2.

    (2) S’ils sont admis aux épreuves des concours, ils devront posséder le M2 pour être nommés en qualité de fonctionnaires stagiaires. S’ils n’ont pas le M2 à la rentrée suivant leur admission, ils bénéficient d’un an de report pour valider le M2, au terme duquel ils pourront être nommés fonctionnaires stagiaires.

    B. CONCOURS AGREGATION

    Pour les étudiants préparant le concours de l’agrégation, UNE SEULE EXIGENCE est requise : ils devront être détenteurs d’un Master au moment de l’inscription au concours. Sauf dérogations, ils seront nommés en qualité de fonctionnaires stagiaires à la rentrée suivant leur admission aux épreuves du concours.

    2. SITUATION TRANSITOIRE POUR L’ANNEE 2009-2010

    A. CONCOURS PE ET CAPES

    Toujours DEUX EXIGENCES requises (l’une pour l’inscription au concours [1], l’autre pour la nomination en qualité de fonctionnaire stagiaire [2]), mais avec une année d’études en moins :

    [1] Pourront s’inscrire d’une part les candidats admissibles aux épreuves 2009 (ou antérieurement, en l’absence de concours en 2009), et d’autre part, les étudiants détenteurs au moins d’une licence. S’ils n’ont que la licence, les candidats doivent obligatoirement être également inscrits en 1ère année de Master (M1).

    [2] S’ils sont admis aux épreuves des concours, ils devront posséder le M1 pour être nommés en qualité de fonctionnaires stagiaires. Aucun report pour permettre une validation ultérieure n’est envisagé.

    B. CONCOURS AGREGATION

    Il semble bien que la SEULE EXIGENCE requise soit uniquement et pour la dernière fois l’ancienne règle : à l’inscription, les candidats devront être détenteurs au moins d’un M1. Nulle exigence autre que la réussite au concours n’apparaît concernant la nomination en qualité de fonctionnaire stagiaire.

    II. VARIA (GLOSES, SCOLIES ET COMMENTAIRES...)

    Nous proposerons trois pistes de commentaires, concernant les collègues, les étudiants, et les citoyens de ce pays.

    1. COMMENTAIRES A USAGE DES COLLÈGUES

    A. RETOUR SUR LE PRÉSENT : LES OUBLIS DE LA LOI.

    S’il reste vrai que sans le mouvement de l’an dernier qui a contraint les ministères concernées à reculer et à amender leur copie, il n’y aurait même pas eu lieu de discuter de ces mesures transitoires, il n’en reste pas moins que celles-ci sont insuffisantes, contradictoires et lacunaires, voire préoccupantes .

    C’est ainsi que pour les AGRÉGATIFS 2009-2010, les textes ne prévoient pas le cas d’agrégatifs qui ne seraient pas admis cette année et qui voudraient repasser le concours l’année d’après (la chose arrive parfois...). Pour s’inscrire dès septembre 2010, ils devront bel et bien être détenteurs d’un M2, là où cette année il leur a suffi d’un M1. Ce qui suppose que, dans l’impossibilité de parier sur un succès à coup sûr, nous conseillerons à tous nos agrégatifs détenteurs du seul M1 de s’inscrire dès la présente rentrée en M2 et de le valider avant septembre 2010.

    Il en va de même pour les candidats malheureux aux concours PE et CAPES de la session 2010 : eux aussi devront montrer patte blanche (en l’occurrence être détenteurs d’un M1) pour se réinscrire en septembre 2010.

    Dès lors se pose la question de la validation d’un M2 (agrégatifs) ou d’un M1 (étudiants PE et CAPES) quelque part entre juillet et août 2010 (étant bien entendu que l’année présente sera consacrée à la préparation habituelle du concours, qui ne laisse guère de place à d’autres loisirs, fussent-ils lettrés). La question était partiellement réglée dans une circulaire antérieure aux décrets (circulaire du 5 juin 2009 : voir les textes en document joint)

    Celle-ci posait trois règles :
    - l’inscription en IUFM vaut inscription en M1 ;
    - la validation partielle ou totale du M1 et du M2 ou l’équivalent en crédits ECTS sera appréciée au cas par cas ;
    - la validation de 60 ECTS pour l’année de M1 sera accordée aux candidats ADMIS aux épreuves du concours et inscrits soit en IUFM soit à l’université (en année de préparation au concours ou en M1).

    Mais les décrets ne font plus mention de cette circulaire. D’où une situation en attente de clarification : des universités ont obtenu la confirmation officieuse que la circulaire de juin est toujours valide. Valérie Pécresse, sous la pression des syndicats étudiants et pour éviter les doubles frais de scolarité, s’est en outre engagée publiquement à ce qu’il n’y ait pas de double inscription en master (IUFM +université d’origine).

    Les conséquences d’une telle décision pour la carte des formations et le budget seront lourdes pour les universités qui n’ont pas été choisies pour intégrer l’IUFM, dans les académies où il n’y a pas une seule université. On tient là une autre illustration d’une politique au jour le jour, qui relève du cabotage à courte vue en donnant satisfaction provisoirement à telle ou telle partie sans se préoccuper des conséquences de la décision prise.

    B. UNE RENTREE EN CHANTIER

    En conséquence de ces confirmations verbales émanant du cabinet ou de la ministre, la plupart des universités organisent leur rentrée en fonction des préconisations de la circulaire de juin 2009.

    D’où, pour les universitaires, un programme d’activités concertées (à faire valoir sur notre temps de service ?) pour mettre au point les MODALITÉS EXCEPTIONNELLES DE VALIDATION du M1 pour TOUS les étudiants préparant les concours PE et CAPES (si l’on se soucie de leur permettre de se réinscrire au concours l’année d’après au cas où...), et du M2 pour TOUS les agrégatifs (pour la même raison).

    Validation forcément exceptionnelle, puisqu’il serait particulièrement casuiste de leur demander la rédaction d’un mémoire ou la validation d’un tronc commun d’épreuves entre la mi-juillet (date des résultats définitifs des concours) et la fin août.

    Si le cas des admis aux concours PE et CAPES est réglé par la circulaire (validation des 60 ECTS du M1) - ce qui permettra au passage leur nomination immédiate en qualité de fonctionnaires stagiaires -, et si les agrégés de cette dernière vague n’auront pas besoin de la validation de leur M2, les problèmes se posent pour tous les autres, admissibles et non admissibles.

    La circulaire de juin se contente d’énumérer tous les critères possibles de validation sans tenir compte de leur faisabilité pour les étudiants (résultats aux concours, assiduité, notes des concours blancs, validation d’UE de M1, stages, rédaction d’un mémoire, etc.). Cette absence de cadre national de référence (comme dans quasiment toutes les autres questions pendantes) contribuera à coup sûr à encourager toutes les formes de déréglementation (et de concurrence entre établissements) sur ce dossier.

    C. BREF COUP D’OEIL SUR LE FUTUR : Y A-T-IL UN AVENIR POUR LES MAQUETTES ?

    Un second programme d’études et de recherche s’ouvre aussi devant nous, concernant la gestion de la nouvelle règlementation telle qu’elle s’appliquera en septembre 2010.

    Dans l’œil du cyclone, les étudiants préparant les concours PE et CAPES, puisque ceux qui n’auront que le M1 devront faire deux années en une, avec une double inscription (au concours et en M2). Certes ils ont deux ans pour valider leur M2, puisque, en cas de succès au concours, ils peuvent en garder le bénéfice un an : mais un an pendant lesquels ils seront sous le seul régime étudiant et non pas en année de fonctionnaire stagiaire.

    D’où une belle perspective de débats entre les tenants d’un véritable M2 recherche, fût-il à parcours concours, mais qui demandera de fait deux ans dans la majorité des cas pour être bouclé et les promoteurs d’un M2 concours, avec possibilité de parcours recherche, qui soit compatible avec la préparation au concours : dans les disciplines des sciences humaines et sociales en particulier, l’articulation entre masters recherche et préparation aux concours sera plus que jamais d’actualité.

    Débats renforcés encore par la perspective d’une évolution des concours eux-mêmes (qui obligeront les préparations à se remodifier), jusqu’au moment, prévisible et proche, où ils seront supprimés, tant il est évident que la loi prépare le passage d’un recrutement sur concours, articulé à des postes de fonctionnaires statutaires, à un recrutement sur diplômes qui libèrera l’État de la gestion des emplois par des postes.

    Autres débats en vue, et qui mériteraient à eux seuls une analyse circonstanciée, les modalités d’organisation, de financement et de répartition des stages à l’intérieur de la préparation aux concours : pour ne pas gâcher tous les plaisirs à la fois, nous nous contenterons de renvoyer le lecteur à la circulaire de référence, du 27 août 2009) et nous reviendrons en détail sur ce point dans une prochaine contribution de SLU.

    Ajoutons seulement que par la grâce de la réglementation, les étudiants (et nos maquettes) auront à faire trois choses en une, un master, une préparation au concours, et une formation sur le terrain (108 heures) – laquelle cependant n’est pas exigée pour l’inscription et la validation des concours, pas plus qu’elle n’est prise en compte, pour l’instant, dans les épreuves des concours : d’où le fait que certaines universités ou certaines disciplines dans d’autres universités ont choisi de ne pas mettre en place les stages pour la présente année.

    Quel master pour quel concours ? Comme on le voit, si la question n’est pas neuve, elle est cependant toujours d’actualité...

    D. LE CALENDRIER

    Rappelons enfin le CALENDRIER des festivités :
    - un texte ministériel de cadrage des maquettes est attendu pour le mois de décembre (2009) ;
    - et la remontée des nouvelles maquettes devrait se faire avec le printemps 2010 (mi-avril).

    N.B. : pour nous donner un peu de courage, on remarquera que c’est exactement le même calendrier que l’an dernier qui est proposé. Or ce calendrier nous avait permis de mettre en place notre action contre la réforme et d’obtenir son report.

    D’où deux possibilités au regard du calendrier actuel : soit le MESR est persuadé que nous n’aurons pas de capacité de mobilisation suffisante pour réagir et ils font preuve d’une extrême assurance (voire d’un peu d’arrogance), soit ils font une erreur tactique que nous devrions mettre à profit pour nous faire entendre.

    2. RÉFLEXIONS SUR LE MÉTIER D’ÉTUDIANT.

    Deux éléments seulement, passablement redondants : la situation des étudiants inscrits aux concours 2009-2010 n’est pas enviable, et celle des étudiants à venir proprement scandaleuse.

    A. LES INCERTITUDES DU PRÉSENT :

    Nous savons tous combien l’année de préparation d’un concours est une année d’épreuve et de stress. Cette année-ci aura donc la particularité intéressante de procurer une double dose de travail et d’inquiétudes, car il faudra aussi trouver le temps et l’énergie de valider le M1 ou le M2 si, comme cela semble se dessiner, le travail de préparation au concours ne donne qu’une équivalence partielle des diplômes.

    Dès lors il faudra aussi, pour les étudiants, s’habituer à des situations inégales d’un endroit à l’autre, puisque la loi laissant aux conseils d’université le soin d’établir les modalités d’évaluation et d’équivalence pour la délivrance des diplômes, chaque université aura ses exigences propres, plus ou moins lourdes, plus ou moins sérieuses, ses nécessités et ses impératifs locaux.

    Bien évidemment, un tel dispositif aboutit à faire sauter le cadre national du diplôme du master, étant entendu qu’à terme, il y aura autant de façon de cuisiner les masters que d’universités.

    B. SEPTEMBRE 2010 ET APRÈS : LE SCANDALE DE LA MASTERISATION

    Il y a la loi (BAC+4 requis pour s’inscrire aux concours PE ET CAPES et BAC+5 requis pour avoir le bénéfice du concours), il y a les débats entre universitaires (masters recherche ET enseignement, préparation du concours OU du master...), et il y a la réalité étudiante.

    Devant un parcours aussi improbable que celui que la nouvelle législation établit, les étudiants continueront à pratiquer les choses de façon « séquentielle » (pour reprendre le terme employé dans une récente interview par Daniel Filâtre, président de Toulouse 2), c’est-à-dire les unes après les autres - et non pas, comme voudrait le laisser penser la législation et le même Daniel Filâtre, de façon « intégrée », autrement dit « embrouillée », tout en même temps.

    Histoire de ne pas travailler un peu à tout et rien à fond, les étudiants valideront d’abord leur Master en entier, puis se consacreront à la préparation du seul concours, pour se donner les chances de l’avoir.

    Le seul hic est bien sûr social : alors même que déjà plus de la moitié des étudiants français sont contraints de travailler pour financer leurs études, le coût financier d’un tel cursus (5 années post-BAC + au moins 1 année de préparation concours) sera à la charge de l’étudiant et/ou de sa famille. Pour devenir professeur des écoles ou des lycées, il ne faudra pas uniquement un BAC+4 comme aujourd’hui (trois années de licence + 1 année de préparation au concours), mais dans les faits un BAC+6 : cela limitera plus que sévèrement le vivier de recrutement.

    C’est là, dans cette sélection sociale inavouée, que ne saurait compenser le saupoudrage actuel des bourses, l’un des écueils principaux de la nouvelle réglementation, à côté de celui que ne cessent de pointer avec justesse les syndicats et les associations : l’université va "fabriquer" des diplômés de masters enseignement, qui permettront à l’État de recruter hors concours national et sur des contrats précaires un certain nombre d’enseignants du primaire et du secondaire.

    Dans le cadre de la réduction drastique du nombre de fonctionnaires voulue par le gouvernement, les étudiants diplômés sans concours (à BAC+6 : master + une année de préparation avec l’échec au bout), seront ainsi d’abord dévolus à être les bouche-trous de l’Éducation nationale, sans les salaires et le statut de fonctionnaires. Ils pourraient bien devenir assez vite la masse principale des futurs enseignants.

    La réforme actuelle de la formation et du recrutement des enseignants prépare l’institutionnalisation d’un corps d’enseignants précaires et par là aussi la multiplication des inégalités statutaires entre enseignants. Elle renforcera de même les inégalités entre établissements, les rectorats n’ayant qu’à puiser dans la masse des enseignants précaires la main d’œuvre pour gérer le manque d’encadrement dans les classes défavorisées.

    3. CONSIDÉRATIONS POLITIQUES SUR LA MISÈRE DE L’ENSEIGNEMENT EN FRANCE

    Le législateur aurait voulu saborder l’enseignement primaire et secondaire qu’il ne s’y serait pas pris autrement.

    Tout d’abord, et pour la première fois dans l’Éducation Nationale, le concours de l’agrégation est sanctuarisé, certes à au moins Bac+6 (Bac+5 et une année ou plus de préparation au concours), mais au bout d’un cursus clair et scientifiquement cohérent : d’abord les diplômes universitaires, puis le concours. L’État a ainsi sauvegardé la qualité des enseignants qu’il recrutera à terme essentiellement pour les classes préparatoires aux grandes écoles.

    On se souvient que c’est aussi dans cet enseignement supérieur-là que l’Etat investit proportionnellement le plus : par an, un étudiant en classe préparatoire aux grandes écoles "coûte" à l’Etat 13 880 euros pendant qu’un étudiant inscrit à l’université hors IUT "coûte" 8 970 euros (source).

    Ce surcoût énorme (proportionnellement, l’État investit 50 % de plus dans les classes prépas qu’à l’université) s’explique, selon le site même du ministère, à la fois par un taux d’encadrement supérieur dans les classes préparatoires et par le surcoût dû au statut des agrégés détachés sur une chaire du supérieur : plus de profs et des profs mieux payés, c’est cette recette que l’Etat applique lui-même, mais dans un secteur extérieur à l’université...

    Un enseignement supérieur à deux vitesses se renforce donc, avec un surinvestissement massif sur une part restreinte du système. Que la formation et les conditions du recrutement des enseignants qui à terme seront spécialisés dans ces classes, soient sauvegardées, comme on l’a vu, avec le décret sur l’agrégation, n’a donc rien d’étonnant.

    En revanche, du côté des conditions de formation et de recrutement des enseignants du primaire et du secondaire, la situation n’ira qu’empirant : la juxtaposition du master et de la préparation au concours va aboutir rapidement à une dévalorisation conjointe des deux (un master moins exigeant pour le rendre accessible aux étudiants qui se consacrent déjà au concours, un concours moins exigeant, avec des épreuves "composites" (D. Filâtre) qui s’adaptent aux diverses situations d’étude...), tandis que les contraintes financières auront détourné nombre d’étudiants du cursus. En profondeur, il mine l’articulation entre formation, concours et statuts, qui a été jusqu’à présent le socle de la qualification de tous les enseignants du service public.

    De manière générale, la formation et le recrutement des enseignants du primaire et du secondaire sont ainsi voués à voir leurs exigences scientifiques reculer : on est loin de la promesse faite par le Président de la république d’un recrutement des enseignants amélioré et revalorisé. Ce qu’on voit bien plus se profiler, c’est une déperdition de l’intérêt scientifique des concours eux-mêmes dans le cas du recrutement des professeurs des écoles, des collèges et lycées – ce qui motivera, à moyen terme, leur abandon par l’État.

    BILAN PROVISOIRE

    La nouvelle réglementation est un montage hasardeux de choix idéologiques (la sanctuarisation du corps des agrégés, l’abandon de la prise en charge par l’État de la formation des enseignants aux universités, la remise en cause des IUFM…) et de mesures bricolées techniquement boiteuses (règles pour l’année de transition, pour la mise en place des stages…).

    Et en ce qui concerne la formation et le recrutement des professeurs des écoles et des professeurs des collèges et lycées (là où il y aura les plus gros effectifs), la loi a fabriqué un monstre (l’année de double inscription en M2 et au concours), qui aboutit de fait à placer tous les concours (y compris pour les enseignements spécialisés et professionnels) dans la situation de l’actuelle agrégation, avec une exigence de M2 qui se retourne contre les étudiants (puisqu’ils devront financer deux années d’études supplémentaires) et qui a été mise en place sans la moindre revalorisation de la grille salariale indiciaire pour la suite de leur carrière s’ils réussissent le concours.

    ÉPILOGUE : SUR UNE SUITE IGNORÉE DE LA PRINCESSE DE CLÈVES

    Madame de Clèves, dont l’esprit avait été si agité par tant de textes magnifiques, tomba dans une maladie violente sitôt qu’elle fut arrivée chez elle.

    Elle jugea que l’absence seule et l’éloignement pouvaient lui donner quelque force. De grandes terres qu’elle avait vers les Pyrénées lui parurent le lieu le plus propre qu’elle pût choisir.

    Là, elle médita tout à loisir les nouvelles règles de la législation.

    Enfin, ses forces lui revenant chaque jour davantage, elle se décida à rentrer et entreprit d’alerter tous ceux qui pouvaient la connaître.

    Christine Noille, pour SLU


  • INTERVIEW - Philippe Dulbecco dirige l'université de Clermont-Ferrand-I.

    LE FIGARO. - Quel bilan tirez-vous du passage à l'autonomie ?
    Philippe DULBECCO. - Une université se gère désormais en partie comme une entreprise. En termes de management d'établissement, ça change tout. Il a fallu moderniser les procédures de gestion, les ressources humaines, les services financiers. Nous pensons désormais comme des gestionnaires de ressources humaines, ce qui n'était pas le cas avant. Nous initions notre propre politique de développement. Avant janvier, notre budget était essentiellement affecté par le ministère de l'Enseignement supérieur, depuis nous avons pu répartir nos 102 millions d'euros de façon stratégique. Certaines équipes ont pu recevoir des fonds augmentés, d'autres ont eu moins. Nous avons aussi pour objectif de limiter le nombre d'heures supplémentaires. Lorsqu'un enseignant nous « fait gagner de l'argent » grâce à ses contrats de recherche ou à la formation continue, nous réfléchissons au partage des recettes.

    Comment utilisez-vous vos marges de manœuvre ?
    Nous avons décidé d'engager une politique financière plus incitative. Nous élaborons un systèmede prime pour les responsables de formation et d'équipes de recherche, car ce sont eux qui mouillent leur chemise. Ils sont les piliers de l'université. Ils ont droit à une prime de responsabilité de 4 500 €. C'est très peu au regard d'une entreprise, mais on vient de zéro ! Ces primes sont modulées en fonction des résultats obtenus. Et, si une formation est très bien notée par les organismes évaluateurs, on va doubler la prime du responsable. Nous entendons dégager d'autres marges financières grâce à nos locaux. Nous en avons demandé la propriété et nous nous lançons dans la rénovation de quatre amphithéâtres en plein centre-ville de Clermont-Ferrand. C'est une démarche marketing, on pense les louer.

    Qu'a changé l'autonomie pour l'image de l'université ?
    J'ai débauché les meilleurs pour constituer mon conseil d'administration, à l'instar du président du holding Limagrain ou du numéro deux de Michelin, car je voulais des compétences fortes. Je suis fier de l'effet «club» qu'on a réussi à mettre en place en pleine crise en créant une fondation. Nous avons recueilli 3 millions d'euros et la vingtaine d'entreprises nous soutiennent. Ils s'intéressent à nous, on a envie de travailler ensemble. Si on a une idée, on la finalise vite, car la communication est directe. Grâce à l'argent récolté, de nombreux projets vont voir le jour. Avec l'entreprise Limagrain, nous mettons sur pied un pôle de compétences sur les politiques agricoles. Un autre projet, en collaboration notamment avec des laboratoires pharmaceutiques, consiste à financer des bourses pour faire venir des médecins de l'Afrique subsaharienne afin qu'ils suivent leur spécialité en France. Nous allons aussi travailler avec Sanofi sur un programme de reconversion à destination de salariés dont des postes vont être supprimés.

    Source : http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2009/09/12/01016-20090912ARTFIG00212-je-gere-mon-universite-comme-une-entreprise-.php


  • Logement, coût de la rentrée, baisse des inscriptions, frais illégaux, mastérisation des IUFM : Rémi Martial, délégué national de l’UNI, Thierry Lecras, vice-président de l’Unef et Claire Guichet, présidente de la FAGE, donnent leur sentiment sur les principaux dossiers de la rentrée universitaire.

    Droits d’inscription illégaux

    Le contexte : L’UNEF dénonce les pratiques de 29 universités qui, selon le syndicat, pratiquent des droits d’inscription illégaux, soit la perception de frais supplémentaires au coût légal de l’université.

    Rémi Martial (UNI) : La polémique sur les droits d’inscription illégaux mérite qu’on ouvre un débat. L’augmentation des droits classiques ne serait pas forcément une mauvaise chose : elle permettrait aux universités de bénéficier de financements supplémentaires et cela responsabiliserait les étudiants, qui, souvent, n’ont pas conscience du vrai coût de leur scolarité. À l’UNI, nous souhaitons une augmentation des droits de scolarité accompagnée d’un système d’aide sociale, comme le prêt à taux zéro, qui maintiendrait l’accès de l’enseignement supérieur à tous.

    Thierry Lecras (UNEF) : Nous avons recensé 29 universités qui perçoivent des droits d’inscription illégaux. Pour l’instant, nous avons déposé des recours gracieux auprès des présidents de ces universités. Nous devons avoir une réunion prochainement au ministère pour examiner les différentes situations. Nous attendons le résultat de cette réunion pour éventuellement déposer des recours en justice.

    Claire Guichet (FAGE) : Il faut faire attention car, sur les chiffres, on entend tout et n’importe quoi. Il y a deux choses distinctes. Beaucoup de frais dénoncés comme illégaux ne sont en fait que des services de la fac, qui sont inscrits par défaut dans les frais à la charge de l’étudiant (pour le sport universitaire par exemple). L’étudiant peut décocher cette option, mais il ne le sait pas, il y a donc un gros travail d’information à faire là-dessus. Il est cependant vrai que certains masters demandent des frais qui sont illégaux, notamment dans les écoles internes aux universités comme les IAE ou les écoles d’ingénieurs. Ces pratiques ne sont pas très nombreuses, mais elles sont en augmentation et nous travaillons avec les présidents d’université pour y mettre fin

    Logement étudiant

    Le contexte : Si des réhabilitations ou des constructions de logements étudiants sont en cours, l’offre sociale reste très insuffisante et l’offre privée très chère.

    Rémi Martial (UNI) : Le logement, c’est le dossier prioritaire de la rentrée, les deux tiers des étudiants sont obligés de trouver un logement en dehors du domicile familial et un tiers a des difficultés, en particulier à Paris. Il faut cesser de confier l’intégralité de la gestion du logement étudiant au CROUS et enfin diversifier les acteurs : faire appel aux universités directement, aux collectivités territoriales. La loi LRU sur l’autonomie permet désormais aux universités de signer des conventions public/privé, c’est une bonne chose. De même, nous saluons le transfert de la gestion de la cité universitaire d’Antony à la communauté d’agglomération des Hauts-de-Bièvre, qui va la rénover. Des logements modulaires vont être construits au Havre, des casernes, comme celle d’Arras, sont reconverties en logements étudiants.

    Thierry Lecras (UNEF) : L’UNEF demande une augmentation de 10% des aides au logement étudiant. Celles-ci n’ont presque pas augmenté depuis les années 90 alors que les loyers ont doublé. Il faut également augmenter les constructions et les réhabilitations. Du retard a été pris par rapport aux engagements passés et la politique du gouvernement est contradictoire : on inaugure en fanfare 34 chambres dans la caserne d’Arras mais on abandonne la gestion des 2100 chambres de la cité universitaire d’Antony à la communauté d’agglomération des Hauts-de-Bièvre. La rénovation prévue va considérablement réduire le nombre de logements. Nous voulons une réhabilitation qui préserve l’ensemble des chambres disponibles.

    Claire Guichet (FAGE) : Il faut réformer les aides au logement, exonérer les étudiants de la taxe d’habitation pour leur permettre d’accéder au parc privé. En terme de logement social, il faut continuer l’effort assez important de 2009 sur les prochaines années. Nous souhaitions que la capacité de la cité universitaire d’Antony, la plus grande d’Ile-de-France, soit préservée mais Valérie Pécresse nous a opposé une fin de non-recevoir. Les nouveaux logements seront moins nombreux et plus chers. Nous allons nous battre pour retrouver une offre équivalente de logements sociaux étudiants sur l’académie de Versailles.

    Le coût de la rentrée

    Le contexte : Des études menées par l’UNEF et la Fage concluent à une augmentation des coûts de la rentrée de, respectivement, 3,2% et 3%.

    Rémi Martial (UNI) : Nous pensons que les études de la Fage et de l’UNEF ne sont pas fiables : elles ne tiennent pas compte des grandes disparités entre les étudiants. Nous souhaiterions qu’une étude indépendante soit menée chaque année. Pour l’instant, le ministère nous a répondu que cela coûterait trop cher.

    Thierry Lecras (UNEF) : Les frais sont tirés vers le haut par les dépenses obligatoires : le logement, les inscriptions universitaires, la couverture sociale, le restau U… Nous souhaitons la mise en place d’un dixième mois de bourse qui permette d’affronter les coûts de la rentrée (sur le modèle du treizième mois des salariés qui tombe à Noël).

    Claire Guichet (FAGE) : Nous souhaitons la mise en place d’une aide spécifique pour pallier les dépenses de la rentrée ainsi que la suppression du mois de carence avant de recevoir les aides au logement. Nous avons aussi proposé un chèque santé qui prendrait en charge 75% des coûts de la complémentaire santé. Cette idée a d’ailleurs été reprise par le Sénat.

    La baisse du nombre d’inscrits à la fac

    Le contexte : Lors de la première phase d’inscription universitaire, en juillet, le nombre d’inscriptions était en baisse par rapport à l’an passé. Une diminution qui viendrait confirmer la tendance des années précédentes.

    Rémi Martial (UNI) : Pour nous, c’est la faute de l’Université qui n’a pas voulu, pendant longtemps, faire de l’insertion professionnelle sa priorité. Mais maintenant, avec la LRU, les choses bougent. Et puis il y a aussi les blocages, à chaque grève étudiante, qui n’incitent guère les nouveaux bacheliers à s’inscrire. Nous avons observé que les universités les plus touchées par les désaffections sont celles où les blocages sont les plus fréquents : à Rennes 2 ou à Toulouse le Mirail, par exemple. Il y a aussi une question de filière. En Lettres, Sciences humaines, Psycho, où il y a peu de débouchés, un manque d’orientation et trop d’étudiants, le phénomène est plus important.

    Thierry Lecras (UNEF) : Nous avons constaté une baisse des inscriptions en juillet. Une des causes de cette désaffection est la dégradation des conditions de la vie étudiante qui oblige certains jeunes à se tourner très vite vers le marché du travail, sans être formé. Le nouveau site d’inscription à la fac admission-postbac.fr est aussi responsable de cette situation : il est très complexe et rigide. Valérie Pécresse dit que c’est une question d’ergonomie alors que nous pensons qu’il faut une remise à plat totale du site. Nous voudrions aussi le rétablissement de la sectorisation en Ile-de-France, pour éviter d’avoir des universités à deux vitesses.

    Claire Guichet (FAGE) : Pour l’instant, nous n’avons aucune preuve que ça baisse cette année, nous allons attendre la fin des inscriptions de septembre avant de tirer des conclusions. Globalement, sur plusieurs années, il y a effectivement une légère baisse que nous pouvons imputer à la dévalorisation des diplômes universitaires.

    La mastérisation des IUFM

    Le contexte : Luc Chatel est devenu ministre de l’Education nationale à la place de Xavier Darcos et des décrets entérinant l’obligation d’être titulaire d’un master pour devenir enseignant à partir de 2010 ont été publiés au Journal officiel fin juillet.

    Rémi Martial (UNI) : Luc Chatel, le nouveau ministre de l’Education, a une démarche différente de celle de Xavier Darcos. Pour l’instant, les choses ne sont pas tranchées : nous pensons qu’en discutant, nous arriverons à des solutions satisfaisantes pour tout le monde.

    Thierry Lecras (UNEF) : Sur ce dossier de la mastérisation nous attendons une réponse de Luc Chatel qui ne nous a pas encore reçu. Des décrets sont passés cet été et nous dénonçons ce passage en force : à ce moment-là, les négociations syndicales étaient en cours. Il est nécessaire de rediscuter : les questions du cadrage du master, des inscriptions au concours et de l’accompagnement financier des étudiants sont toujours sur la table.

    Claire Guichet (FAGE) : La négociation se poursuit sur la mastérisation. Des décrets sont passés cet été, mais il reste à discuter des types de concours ou encore des contenus des masters, par exemple de l’équilibre au sein du cursus entre la future matière enseignée et les matières pédagogiques.

    Source : http://www.boivigny.com/Les-organisations-etudiantes-s-attaquent-aux-dossiers-de-la-rentree_a636.html

  • Pour éviter les échecs en première année, les établissements s'adaptent.

    Elle est le point aveugle du système éducatif, la statistique qui dément toutes les autres : 50 % d'étudiants échouent en première année d'université. C'est le seul véritable indicateur du niveau des élèves, et les satisfecit qui accompagnent chaque année les résultats du baccalauréat ne sont là que pour faire oublier ce gâchis. Le Plan pour la réussite en licence, lancé par Valérie Pécresse en décembre 2007 dans la continuité de la loi LRU, et qui entre peu à peu en vigueur, se veut une réponse au problème, une façon de proposer des solutions à des étudiants angoissés par cette nouvelle «constante macabre».

    «J'avais demandé une classe préparatoire, explique Aurélie, fraîchement inscrite en histoire après un bac ES mention assez bien, mais mon dossier de terminale n'était pas suffisant. Bien sûr, j'ai peur de me retrouver noyée, de ne pas m'en sortir avec les cours magistraux, la prise de note… Et puis, je ne sais pas comment il faut faire quand on commence à perdre pied, à qui il faut s'adresser.»

     

    «Orientation active»

     

    Les bacheliers qui arrivent aujourd'hui en première année de licence n'ont pas le profil d'il y a vingt ans. Moins autonomes, ne maîtrisant pas les bases, même dans le domaine qu'ils ont pourtant choisi, ils découvrent dans l'anonymat des amphithéâtres la fragilité de leur formation. Et pour éviter le naufrage collectif, les universités tentent de s'adapter.

    Dans un nombre croissant d'établissements, les traditionnelles journées d'intégration, avec présentation du campus ou initiation à l'informatique, ont laissé place à des stages de prérentrée, véritable propédeutique au monde universitaire. L'université d'Évry, dans l'Essonne, entend ainsi «désacraliser l'université» aux yeux des étudiants, tout en rappelant quelques connaissances de base.

    Cours disciplinaires de trois à six heures, travaux sur la prise de notes, les recherches en bibliothèques… le tout proposé gratuitement aux étudiants, alors que les officines de soutien scolaire se lancent activement dans les stages de remise à niveau à destination des étudiants. À Évry, 400, parmi les 1 000 étudiants inscrits en première année, ont répondu à l'appel.

    Les 730 millions d'euros mis sur la table par le ministère de l'Enseignement supérieur pour rénover la licence permettent de financer notamment le dispositif d'«orientation active» : les élèves de terminale signalent leurs choix d'études supérieures sur Internet. L'université repère les étudiants les plus faibles et leur suggère d'autres parcours ou leur propose un tutorat. Ou comment traiter en aval les carences du primaire et du secondaire.

    Source : http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2009/09/14/01016-20090914ARTFIG00458-les-facs-font-de-la-remise-a-niveau-.php


  • Rdvs :

    -A l'occasion des Journées du Patrimoine ce week-end, les mobilisés de la Sorbonne proposent une visite guidée "Sorbonne mobilisée" sur le thème "L'esprit critique universitaire fait aussi partie de notre patrimoine". Rendez-vous dimanche à 15h à l'entrée de la Sorbonne pour visiter gratuitement et librement l'université... sous un autre angle. Les guides seront reconnaissables à leurs brassards jaunes "Sorbonne en grève".



    -De 18h à 20h : projection de L'Impossible III de Sylvain George sur les manifestations du 19 mars et 1er mai 2009, en soutien aux étudiants inculpés et dont les procès auront lieu les 22 septembre et 5 octobre 2009. Suivie d'une rencontre avec les étudiants et comité de soutien.

    Lieu : CENTQUATRE, 104 rue d'Aubervilliers / 5 rue Curial.

    En métro : lignes 2, 5, 7 - station Stalingrad (bd de la Villette, sortie n°2) ; ligne 7 - stations Crimée ou Riquet.

    Source : http://www.104.fr/#fr/Artistes/Blog/B143-Sylvain_George